All posts by Stephane Cesaire-Gedeon

rc-xyz-nft-gallery-w9coDxtsfts-unsplash

IRRBB : finalisation et reporting

 stephane-cesaire-gedeon
Stéphane Césaire-Gedeon
Consultant

Contexte

Après plusieurs années de taux bas, la fin de l’année 2022 marque le début d’une hausse des taux à la fois forte et rapide. En effet, l’Europe a connu pas moins de dix relèvements des taux directeurs par la Banque centrale européenne (BCE) entre juillet 2022 et septembre 2023 (cumul de +400 points de base sur les opérations principales de refinancement).

Outre-Atlantique, ce nouvel environnement de taux a largement contribué à une cascade de faillites de banques régionales américaines[1] qui auraient pu être évitées avec une surveillance d’indicateurs pertinents de mesure du risque. Cela dit, les impacts dans la zone euro sont restés limités et de courte durée (volatilité des marchés après le choc).

Contrairement aux Etats-Unis, toutes les banques de l’union européenne sont soumises aux standards prudentiels bâlois dans un cadre règlementaire stricte qui inclut le risque de taux dans le portefeuille bancaire dit IRRBB (le test réglementaire de mesure du risque de taux en valeur économique des fonds propres (EVE) prévu par cette règlementation aurait révélé une sensibilité excessive à la hausse des taux des banques défaillantes s’il avait été utilisé). Néanmoins, il a été utile d’en tirer un certain nombre de leçons indépendamment des spécificités de gestion des établissements en question afin d’anticiper les risques et challenges associés à cette nouvelle dynamique sur les taux d’intérêt et prévoir des ajustements adaptés. Dans ce contexte, un certain nombre d’évolutions ont été apportées au cadre règlementaire existant de l’IRRBB avec l’objectif clair de renforcer le dispositif sur la capacité des banques à mesurer le risque mais également permettre la surveillance et les contrôles par les régulateurs. Sur ce dernier point, des rapports dédiés à l’IRRBB seront intégrés au cadre de reporting COREP[2] et feront l’objet d’une première remise sur l’arrêté du 30 septembre 2024.

Pour rappel, le dispositif IRRBB se base sur les deux principales métriques suivantes dont la sensibilité aux taux d’intérêt est analysée à travers des scenarios de chocs de taux définis par la réglementation[3] :

  • Marge nette d’intérêt (MNI),
  • Valeur économique des fonds propres (EVE).

Mises à jour majeures

Le 20 octobre 2022, l’Autorité bancaire européenne (ABE) a publié un package contenant de nouvelles guidelines et des standards techniques autour de l’IRRBB et le risque de spread de crédit dans le portefeuille bancaire dit CSRBB.

Ce package comprend les éléments suivants :

  • Mise à jour des guidelines précédentes EBA/GL/2018/02 par une nouvelle guideline EBA/GL/2022/14 qui introduit CSRBB et quelques modifications mineures sur IRRBB.
  • Normes techniques réglementaires (RTS) pour introduire l’indicateur SOT (Standard Outlier Test) sur la MNI et une mise à jour sur le SOT EVE existant (EBA/RTS/2022/10, directive via 2024/856).
  • Normes techniques réglementaires (RTS) pour mettre en place des modèles standards pour la mesure de l’EVE et de la MNI (EBA/RTS/2022/09, directive via 2024/857).

Il s’accompagne également de normes techniques de mise en œuvre (ITS) qui définissent le reporting de ces éléments (ITS/2023/03, directive via 2024/855).

SOTs 

Le SOT permet d’identifier les institutions qui ont un risque de taux d’intérêt anormalement élevé sur la base des deux critères suivants :

  • SOT EVE : une variation d’EVE dans l’un des six scénarios de chocs de taux définis par l’EBA qui excède 15% des fonds propres de catégorie 1.
  • SOT MNI : une variation de la MNI dans les deux scénarios de chocs de taux et sur un horizon d’un an qui n’excède pas 5% des fonds propres de catégorie 1.

SOT MNI

Le SOT MNI est une nouveauté. Il est déterminé avec l’hypothèse d’un horizon d’un an et un bilan constant.

Il est probable qu’il n’y est pas de conséquences immédiates au dépassement du nouveau SOT MNI car le régulateur n’exclut pas une recalibration régulière en fonction de l’évolution des taux d’intérêt (le seuil était précédemment fixé à 2.5%. Il a donc doublé pour tenir compte de l’évolution rapide des taux à la hausse). En revanche, le SOT EVE est lui plus ancien. Pour ce dernier, il n’y aura pas une période de transition similaire et un dépassement du seuil mènera rapidement à des sanctions.

SOT EVE

Le principal changement c’est que le seuil de 20% des fonds propres de catégorie 1 n’est plus applicable. Désormais, seul le seuil de 15% est retenu (ce dernier était précédemment uniquement un signal d’alerte).

Taux planchers sur les SOTs

Modification des planchers de taux d’intérêt après chocs de taux (applicable aussi bien pour le SOT EVE que le SOT MNI). Ces planchers démarrent à -150 points de base pour le taux overnight, augmentant linéairement de 3 points de base par an, pour atteindre 0% pour les maturités à partir de cinquante ans. Ils sont significativement inférieurs à ceux qui étaient applicables sur la précédente version.

Modèles IRRBB standards 

Les normes techniques décrivent une approche standard de l’IRRBB afin de mesurer l’EVE et la MNI.

Contrairement à certaines approches standards existantes sur d’autres périmètres règlementaires (ex : ratio de solvabilité), l’approche standard IRRBB n’a pas vocation à dispenser les banques de développer un modèle interne. En effet, ces modèles standards doivent être implémentés uniquement à la demande du régulateur qui va le préconiser s’il considère que le modèle interne de la banque est inefficace.

Le régulateur a également prévu des approches simplifiées pour les institutions qui sont jugées de petite taille et non complexes.

CSRBB  

Le régulateur introduit CSRBB qui permet de mesurer le risque sur l’EVE ou la MNI lié à des changements sur les spreads de crédit. Le règlement va lui associer des méthodes de mesure et une surveillance similaire à ce qui est déjà en place pour IRRBB.

Le risque est mesuré sous l’hypothèse du même niveau de solvabilité étant donné que les risques dit Idiosyncratiques ne sont généralement pas pris en compte (ils peuvent être inclus si cela donne des résultats qui sont plus prudents).

En termes de périmètre, les institutions doivent évaluer tous les éléments du bilan et hors bilan sensibles au spread de crédit et qui peuvent avoir un impact sur l’EVE et la MNI. Toute exclusion d’une position doit être à la fois documentée et justifiée. Toutefois, un périmètre minimum est spécifié dans le texte : il s’agit des actifs en juste valeur qui doivent dans tous les cas être considérés.

 Cap à 5 ans sur les dépôts non échéancés

Un plafond de cinq ans sur l’échéance moyenne pondérée pour la révision des taux d’intérêt est désormais introduit pour les dépôts non échéancés de détail et de gros (dans la version 2018, cette contrainte ne s’appliquait qu’au SOT EVE). Cette hypothèse comportementale vise un traitement prudent de ces dépôts qui s’avèrent être un élément important dans le calcul de l’impact des changements de taux d’intérêt.

[1] Silicon Valley Bank, la plus grande banque du lot a collecté une grande quantité de dépôts provenant en grande partie de start-ups de la tech dans une période de forte croissance du secteur. Ces dépôts ont été en grande partie investis dans des actifs à taux fixe et à long terme (bons du Trésor américain). Lorsque la croissance sur le secteur a baissé, certains ont commencé à retirer leurs dépôts et la banque a été obligé de vendre ces actifs à perte puisqu’ ils avaient perdu considérablement en valeur suite à la forte hausse des taux intérêts. Ces pertes ont mené à des retraits massifs de dépôts et la faillite.

 Obligation de reporting

Le reporting IRRBB dans le cadre du COREP se synthétise comme suit :

Modèles de repotring
Modèles de reporting

Le régulateur a prévu une classification des établissements en vertu du principe de proportionnalité : Grande taille, établissements de petite taille et non-complexe, autres établissements. Les deux derniers bénéficient de modèles de reporting simplifies sauf sur le premier modèle qui donne la vue globale sur les indicateurs.

Focus sur le premier modèle J 01.00 / Vue globale des indicateurs et de leurs sensibilités

Variation d’EVE et de MNI par choc de taux 

Les métriques que sont les variations d’EVE et de MNI en fonction des différents scenarios de stress règlementaires tiennent une place centrale et leurs variations doivent être renseignées pour chaque scenario de choc de taux (6 pour l’EVE, 2 pour la MNI).

SOTs 

Les SOTs sont renseignés sur les lignes mises en évidence en rouge sur les extraits du modèle ci-dessous.

Value of equity

Le remettant renseigne des ratios qui correspondent à la plus large variation d’EVE ou de MNI rapportée aux fonds propres de catégorie 1. Idéalement, le ratio affiché est inférieur aux plafonds fixés par le régulateur (15% des fonds propres de catégorie 1 pour le ratio EVE et 5% pour le ratio MNI).

Variation de juste valeur 

Durant la phase de consultation, il y’a eu une réflexion sur la définition de la MNI à utiliser pour les calculs. On parle de MNI au sens strict ou dans un sens plus large.

Dans le premier cas, la MNI est constituée uniquement des produits d’intérêt moins les charges d’intérêt. Dans l’autre cas, elle inclut également les variations de juste valeur.

Le régulateur a statué sur ce point et a retenu la MNI au sens strict et ce choix est justifié par le fait que cette méthode est plus adaptée pour faciliter la comparabilité entre les établissements.

Néanmoins, on peut constater que les variations de juste valeur apparaissent tout de même comme une métrique à part dans le rapport et sont donc considérées comme une composante importante de l’analyse même si elles ne sont pas directement intégrées à la MNI. Comme pour cette dernière, le remettant renseigne la valeur de la valorisation sur le scenario de base et les variations sur les deux scenarios de stress réglementaires.

Market value changes

Taille des chocs de taux pour les “autres devises” 

Pour certaines devises, le régulateur ne fournit pas directement la valeur des chocs de taux à appliquer mais plutôt une méthodologie permettant de réaliser une calibration. Ce processus permet d’obtenir les chocs pour les devises en question qui doivent être reportés en point de base dans le tableau ci-dessous.

Other currencies

[2] COREP (Common Reporting Framework) est un ensemble de reportings standardisés émis par l’Autorité bancaire européenne (ABE).

[3] Il s’agit précisément de six chocs de taux avec des variations parallèles de la courbe de taux (vers le haut/bas) et des déformations de la courbe de taux avec une hausse/baisse des taux courts, l’aplatissement et la pentification de la courbe. Pour la MNI, seuls les deux scénarios de variations parallèles sont utilisés.

CRR3_header

La nouvelle approche standard du risque de crédit dans le cadre de CRR3 (Capital Requirement Regulation)

Stéphane Césaire-Gédéon
Consultant

Contexte

Le 27 octobre 2021, la Commission Européenne a publié le règlement CRR3 qui, avec la directive CRD6, constitue le dernier volet des réformes réglementaires Bâle III engagées à la suite de la crise financière mondiale de 2007-2009.

Dans ce règlement, les modifications sur les dispositions de l’approche standard du risque de crédit pour le calcul des emplois pondérés entrent en vigueur le 1er janvier 2023 (1) et impliquent les changements les plus significatifs pour les raisons suivantes :

  • Pour la plupart des banques, le risque de crédit représente la plus grande part du risque ;
  • L’approche standard du risque de crédit est la plus utilisée dans le monde (par comparaison avec l’autre approche autorisée qui est fondée sur les notations internes).

Le défaut principal identifié sur cette approche standard du risque de crédit est le manque de sensibilité au risque qui résulte d’une mauvaise estimation des risques et donc des montants d’emplois pondérés inappropriés. De ce fait, l’objectif principal du texte est de restaurer la crédibilité du ratio de solvabilité en apportant cette plus grande sensibilité au risque.

Ceci se traduit concrètement par :

  • une granularité plus fine des catégories d’exposition,
  • la recalibration des pondérations et facteurs de conversion,
  • l’introduction de nouvelles pratiques pour calculer la pondération (ex : ratio exposure-to-value, l’approche SCRA décrite dans la suite de cet article),
  • la modification des conditions d’application de certaines pondérations,
  • la volonté de réduire le recours mécanique aux notations de crédit externes en imposant une due diligence autour de l’utilisation des notations et la conception de certaines approches de pondération non fondées sur les notes.

Les sections suivantes décrivent donc ces changements pour atteindre les objectifs du régulateur par catégorie d’exposition.

 Expositions du hors bilan

En plus d’une reclassification des éléments de hors bilan avec un regroupement en classes de risque graduées de 1 à 5, les conditions d’application sont également précisées par une définition du terme « engagement » et une dérogation pour les types d’accords contractuels qui ne doivent pas être considérés comme des engagements.

En outre, les niveaux de pondération sont à la hausse puisque le facteur de conversion de 0 % est supprimé et deux nouveaux facteurs de conversion sont introduits : un facteur intermédiaire de 40 % et un facteur de 10 % (qui devient la pondération minimum). Cependant, les établissements pourront continuer à appliquer un facteur de conversion de 0 % sur les accords contractuels qui ne sont pas considérés comme des engagements.

Expositions sur les établissements financiers

En complément de l’approche existante par laquelle une pondération est déterminée en fonction des notations de crédit fournies par les agences de notation (approche dite “ECRA”), CRR3 introduit une nouvelle approche appelée SCRA (l’approche standard de l’évaluation du risque de crédit) lorsqu’aucune notation n’est disponible.

Établissements notés (approche ECRA)

Cette approche se caractérise par un abaissement de la pondération de 50 % à 30 % pour les expositions sur des établissements pour lesquels une agence de notation a attribué une note correspondant à un échelon de qualité de crédit de niveau 2 sans changement sur les expositions à court terme.

Néanmoins, dans l’optique de contrôler l’adéquation du niveau de risque retenu, les établissements sont soumis à des exigences de diligence sur les notes émises par les agences de notation afin d’éviter une application mécanique des pondérations. Cela dit, la règlementation ne précise pas encore en détail la façon dont ces diligences doivent être effectuées.

Établissements non notés (approche SCRA)

Avec SCRA, les établissements sont classés dans trois nouvelles classes de A à C comme ci-dessous.

*Les expositions classées dans l’échelon A qui ne sont pas à court terme reçoivent une pondération de risque de 30 % lorsque le ratio de fonds propres de base de catégorie 1 de l’établissement est égal ou supérieur à 14 % et le ratio de levier est supérieur à 5 %.

Par rapport au texte précédent, la pondération minimum par défaut a été doublée (de 20 % à 40 %) pour les expositions qui ne sont pas à court terme.

D’autre part, la pondération dépendait exclusivement d’un échelon de crédit attribué aux expositions de l’administration centrale alors que le traitement CRR3 s’affranchit de l’exploitation d’une notation de crédit et prend plutôt en compte le respect des exigences de fonds propres et le niveau de dépendance aux conditions économiques favorables pour honorer les engagements financiers (voir tableau ci-dessus).

Ceci va clairement dans la direction souhaitée d’augmenter la sensibilité au risque avec, au passage, une diminution de la dépendance aux systèmes de notation.

Expositions sur les entreprises hors financement spécialisé

L’abaissement de la pondération de 100 % à 75 % est applicable aux expositions sur des entreprises pour lesquelles une agence de notation a délivré une note correspondante à un échelon de qualité de crédit de niveau 3. Ensuite, les expositions pour lesquelles il n’existe pas d’évaluation de crédit reçoivent une pondération de risque de 100 % sauf pendant une période transitoire. En effet, durant cette dernière, une pondération de risque de 65 % est appliquée lorsque l’exposition présente une probabilité de défaut jusqu’à 0,5 %.

Cette dernière disposition est liée à l’application du nouveau plancher de fonds propres (2) qui implique que les établissements qui appliquent l’approche de notation interne calculent également les emplois pondérés avec l’approche standard de risque de crédit qui utilise des notations externes. Étant donné que peu d’entreprises de l’Union Européenne sollicitent des notations externes et que les pondérations avec l’approche standard sont plus prudentes pour les entreprises non notées, cette situation va augmenter les exigences de fonds propres pour les établissements et donc le risque que les banques restreignent les prêts aux entreprises non notées.

Afin de remédier à cette situation, la disposition transitoire qui va durer jusqu’au 31 décembre 2032, offre du temps pour la mise en place d’initiatives visant à étendre la couverture de notation de crédit externe. Les autorités de surveillance sont chargées d’orienter ces initiatives avec la préparation d’un rapport sur les mesures à prendre pour remédier aux obstacles à la disponibilité d’évaluation de crédit.

Expositions de financement spécialisé

Le nouveau règlement introduit une nouvelle sous-catégorie « financement spécialisé » au sein de la catégorie existante « expositions sur les entreprises ». Elle est subdivisée entre les trois types suivants : le financement d’objets, le financement de matières premières et le financement de projets.

En plus de cette nouvelle classification, une granularité complémentaire offre un traitement favorable en matière de fonds propres pour les expositions non notées sur les financements d’objets qui remplissent des critères établissant un profil de risque à un niveau de « qualité élevée » (les critères sont spécifiés dans l’article 122 bis de CRR3).

Deux approches de pondération vont cohabiter : une première concerne les expositions pour lesquelles une notation externe existe, et une deuxième pour celles qui sont non notées.

Expositions notées de type financement spécialisé

Le niveau de pondération est défini de 20 % à 150 % en fonction de l’échelon de qualité de crédit.

Expositions non notées de type financement spécialisé

Sur cette nature d’exposition, l’effort du régulateur pour mettre en place une pondération détaillée est particulièrement perceptible. Cette pondération dépend de l’objet du financement et des spécificités associées pour qu’elles soient adaptées (voir tableau ci-dessous).

* à condition que l’ajustement des exigences de fonds propres pour risque de crédit prévu à l’article 501 bis ne soit pas appliqué.

Expositions sur la clientèle de détail

Le nouveau règlement ajoute une pondération de 45 % à la pondération par défaut de 75 % pour certaines expositions renouvelables (3) qui ont un profil de risque réduit dit « expositions sur transactionnaire »

Un multiplicateur fixé à 1,5 de la pondération est également mis en place pour les expositions non couvertes lorsqu’il y a une différence entre la monnaie du prêt et celle de la source de revenu du débiteur. Toutefois, il existe un plafond de 150 % sur la pondération qui résulte de ce calcul.

Par ailleurs, une dérogation permet d’appliquer une pondération de 35 % sur les expositions liées à des prêts aux retraités / employés en échange d’une partie de la pension / salaire de l’emprunteur à l’établissement.

En revanche, les expositions sur des personnes physiques qui ne remplissent pas toutes les conditions pour être considérées comme des expositions sur la clientèle de détail doivent être pondérées à 100 %.

Expositions garanties par une hypothèque sur un bien immobilier

Le nouveau traitement de pondération garde la distinction entre les hypothèques résidentielles et commerciales mais ajoute de nouvelles distinctions :

  • Expositions IPRE : financement qui repose sur les revenus générés par le bien en garantie
  • Expositions ADC : expositions sur l’acquisition de terrains, la promotion et la construction de biens

Il prévoit également un traitement alternatif plus sensible au risque en fonction d’un ratio Exposure-to-value : montant brut de l’exposition / valeur du bien.

Les règles avec ces nouveaux éléments et cette nouvelle granularité sont résumées dans le tableau ci-dessous.

À noter : des autorités compétentes peuvent augmenter les niveaux de pondération du tableau ci-dessus. Pour faciliter cet exercice, l’autorité bancaire européenne doit soumettre des projets de normes techniques de règlementation à la Commission Européenne d’ici le 31 décembre 2024.

Par dérogation, une exposition IPRE qu’elle soit garantie par un bien immobilier résidentiel ou commercial peut bénéficier du traitement fractionné si le taux de perte agrégé de tous les établissements de crédit est en-dessous des limites fixées au cours de l’année précédente :

  • Pour la partie des expositions inférieure ou égale à 55 % de la valeur du bien, le taux de perte doit être inférieur ou égal à 0,3 % de l’encours total des obligations de crédit,
  • Pour la partie des expositions inférieure ou égale à 100 % de la valeur du bien, le taux de perte doit être inférieur ou égal à 0,5 % de l’encours total des obligations de crédit.

Comme dans la catégorie « Clientèle de détail », un multiplicateur fixé à 1,5 est appliqué à la pondération pour les expositions non couvertes lorsqu’il y a une différence entre la monnaie du prêt et celle de la source de revenu du débiteur sans dépasser le plafond de 150 % sur la pondération.

Une fois de plus, les dispositions pour cette catégorie d’exposition reflètent cette volonté d’affiner les pondérations appliquées par une identification plus précise des cas d‘application.

Expositions sur les créances subordonnées

Application d’une pondération de risque de 150 % par défaut sur les créances subordonnées.

Expositions sur les actions

Les expositions sur actions cotées porteront une pondération de risque de 250 % par défaut au lieu de 100 % précédemment, et les expositions sur actions non cotées seront pondérées à 400 % par défaut. Ces pondérations seront introduites progressivement comme ci-dessous :

Parmi les exceptions, on peut noter qu’une pondération de 100 % peut être appliquée pour des expositions sur actions dans le cadre de programmes législatifs destinés à promouvoir certains secteurs de l’économie ou les expositions portant sur des banques centrales.

 Conclusion

A priori, la réforme va entraîner un alourdissement des exigences en fonds propres pour de nombreuses de banques de l’Union Européenne.

Les changements sont significatifs à la fois pour les niveaux de pondération, les conditions de classement dans une catégorie d’exposition et dans certains cas, la méthode d’estimation des pondérations.

Par conséquent, au regard de ces nombreuses évolutions, les banques doivent fournir un travail conséquent pour répondre aux exigences du régulateur dont l’objectif semble atteint pour certaines natures d’exposition, en particulier pour les expositions sur les financements spécialisés et celles qui sont garanties par un bien immobilier.

(1) Report de la date initialement au 1er janvier 2022, en réponse à la crise COVID-19.

(2) Le plancher de fonds propre révisé prévoit que les emplois pondérés calculés avec les modèles internes ne peuvent pas être inférieurs à 72,5 % des emplois pondérés calculés à l’aide des approches standards.

(3) L’exposition est dite renouvelable lorsque son solde dû par l’emprunteur peut évoluer en fonction de ses décisions d’emprunt ou de remboursement dans les limites fixées.

SURFI

Le SURFI 2.0 est arrivé

Stéphane Césaire-Gédéon
Consultant

Les nouvelles dispositions réglementaires permettent le passage de SURFI à RUBA.

Le contexte du changement

SURFI (Système Unifié de Reporting Financier) qui avait remplacé BAFI (Base des Agents Financiers) en 2010 est un reporting français qui fournit au régulateur des informations utilisées pour le contrôle prudentiel et des statistiques monétaires destinées à la Banque Centrale Européenne (BCE). Ce reporting va évoluer pour répondre aux nouveaux besoins formulés par le régulateur au travers des textes intitulés « Orientations de la BCE concernant les statistiques monétaires et financières ». Étant donné que cette réforme est accompagnée d’une nouvelle taxonomie, ce reporting SURFI change de nom et devient RUBA (Reporting Unifié Banques et Assimilés).

Initialement prévue en 2021, la réforme BCE des statistiques monétaires a été reportée en janvier 2022 en lien avec la crise du COVID-19. À cette même date, la taxonomie RUBA remplacera la taxonomie SURFI pour les remises mensuelles et en mars 2022 pour les remises trimestrielles.

La nouvelle architecture

Il s’agit de la première version de la taxonomie utilisant l’architecture dite Eurofiling qui est déjà utilisée pour les taxonomies CRR / CRD IV de l’EBA ou Solvabilité II de l’EIOPA.

En effet, les concepts de dimensions, d’arborescence d’état ou d’arborescence globale utilisés dans l’architecture de données SURFI sont désormais gérés via le modèle dit « Data Point Model » (DPM) qui a vocation à hiérarchiser et/ou regrouper les éléments intitulés métriques et dimensions (catégorie principale). RUBA n’utilise que ses propres métriques et les dimensions sont regroupées par la notion de domaine.
Par exemple, les codes dimensions MON (Monnaie de l’opération) et DEV (code devise) font partie du code domaine CU (Devise).

Cependant, la structure décrite par le DPM est techniquement matérialisée au format XBRL comme aujourd’hui.

Quels sont les principaux impacts sur le contenu des états ?

Les impacts sur les états sont conséquents puisque la Banque de France estime à 1 800 le nombre de nouvelles cellules à renseigner. Ces évolutions concernent 12 états existants dont 5 états monétaires, sur lesquels s’ajoutent de nouvelles lignes/colonnes et de nouvelles données à communiquer (cellules grisées auparavant). En outre, un nouvel état monétaire a été créé et est entièrement consacré à l’activité de cash pooling.
Ci-dessous, les 13 états concernés :

À noter : certains états ne sont pas repris, comme CREDITHAB qui a été inclus dans la taxonomie CREDITHAB depuis octobre 2020.

Cash pooling

Pour rappel, le cash pooling est un service fourni par une banque de mise en commun de la trésorerie d’un groupe d’entités. Cet état M_CASHPLG nouvellement créé consiste à communiquer le notionnel lié à cette activité avec une ventilation Euro/Devises, et par type de clientèle financière ou non financière.

Comme les autres états monétaires, il sera remis mensuellement. Une discussion est en cours concernant l’assujettissement en fonction de seuils à définir qui seront réexaminés annuellement.

Informations complémentaires sur les titres

Une des modifications a vocation à compléter la ventilation des actions par type de participation. « Autres participations » vient s’ajouter aux catégories « actions cotées » et « actions non cotées » déjà disponibles sous SURFI dans l’état TITRE_PTF, au niveau des rubriques « titres à revenu variable » et « parts dans les entreprises liées » à la fois dans le tableau « actifs résidents » et « actifs non-résidents ».

Par ailleurs, il sera nécessaire de communiquer sur les titres émis et conservés par l’émetteur ou rachetés par ce dernier sur le marché secondaire. Cette modification concerne les états SITUATION France et M_SITMENS dans lesquels une ligne « Auto détention de titres à revenu fixe émis » sera ajouté à l’actif et ainsi qu’une ligne « Auto détention de titres à revenu variable émis » uniquement dans le dernier état cité, toujours à l’actif.

Dépôts et crédits des établissements de crédit vis-à-vis des banques centrales

L’état M_SITMENS est modifié pour ajouter une ligne « crédits aux banques centrales nationales » en données complémentaires à l’actif et une ligne « dépôts des banques centrales nationales » en données complémentaires au passif.

Intérêts courus non échus (ICNE)

De nouvelles lignes ont été créées pour identifier les ICNE sur les dépôts et crédit. Elles concernent à nouveau l’état M_SITMENS et la section « Données complémentaires » des tableaux actif et passif. Une ligne « créances rattachés sur les crédits » s’ajoute à l’actif et « dettes rattachées sur les dépôts » au passif.

Titrisation

Quelques changements indiquent une volonté d’assurer un suivi plus détaillé sur l’activité titrisation.
En effet, les états sur les opérations avec la clientèle et ceux dédiés aux pensions livrées sur titres font apparaître trois nouvelles colonnes afin de détailler les contreparties de titrisation : « Autres intermédiaires financiers », « Auxiliaires financiers » ainsi que « Institutions financières captives et prêteurs non conventionnels ». Il s’agit des états suivants : M_CLIENRE, M_CLIENR, M_PENLIVR, CLIENT_RE, CLIENT_NR, PENS_LIVR.

Dans les états M_CREANCE et CESSCRE, la ventilation des flux/encours par nature de créance et durée initiale devient systématique pour chaque sous-catégorie d’opération avec la clientèle impliquant un véhicule financier ou d’autres cessionnaires (IFM résidente, IFM zone euro hors France), y compris lorsque l’opération n’impacte pas le bilan.

En cas de sortie de bilan, cette ventilation permettra aussi de distinguer les opérations où l’établissement déclarant n’assure pas le recouvrement dans l’état M_CREANCE.

Cependant, la collecte des encours par pays des véhicules financiers dans l’état M_CESSCRE est supprimée.

Immobilier

Les actifs immobiliers (immeuble de bureau, logement, terrain…) faisant l’objet d’une détention directe doivent être comptabilisés dans une ligne « dont avoirs immobiliers ». Cela a été introduit dans la rubrique « valeurs immobilisées » à l’actif de l’état SITUATION France/ ZIEDOM/ ZIEOM. Une ventilation plus fine est en cours de discussion.

Ventilation des contreparties

La catégorie « Organisme de titrisation » remplace « FCC, FCT, SDT » (périmètre identique) et quatre nouvelles catégories sont créées.
À noter : cette ventilation est alignée avec le référentiel ANACREDIT comme le montre le mapping ci-dessous.

Conclusion

Compte tenu des nombreuses évolutions à la fois techniques (introduction du DPM, réorganisation des états, nouvelles lignes/colonnes…) et métiers (ventilation des actions, identification des avoirs immobiliers, nouvel état dédié à l’activité cash pooling…), la nouvelle taxonomie RUBA est un véritable défi pour les départements IT, les directions opérationnelles et les directions financières. Comme toujours sur ce type de chantier, la disponibilité des données et une exploitation efficace des informations constituent les clés de la réussite. Pour cela, l’étude d’impacts doit être réalisée au plus tôt afin de capitaliser au mieux sur le démarrage reporté en 2022.