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La généralisation des robots pour les process à faible valeur ajoutée permet de fortes réductions des coûts, mais suppose des contraintes structurantes.
Dans l’imaginaire collectif, l’utilisation de robots en entreprise renvoie encore souvent au mythe du remplacement de l’homme par la machine, à la réduction drastique des effectifs humains au profit de robots travaillant 24h/24 et 7 jours/7 sans discontinuer et à moindres coûts. D’autres s’imaginent l’entreprise « rêvée » où les problématiques de management de l’humain s’estomperaient peu à peu au profit de l’efficacité et des performances de la machine. La notion de robotisation attise autant les craintes que les passions. Mais cette façon de penser l’automatisation ne tient-elle pas plus du fantasme que du réel ?
Aujourd’hui encore, très peu d’acteurs clés au sein des organisations ont une vision claire et précise de ce que recouvre vraiment la notion d’automatisation robotisée des processus. Il en devient alors difficile pour eux d’envisager les impacts qu’elle pourrait avoir sur leur organisation, de démêler le vrai du faux et de comprendre si sa mise en place peut représenter un véritable gain ou si elle doit être reléguée au rang de simple gadget dans l’air du temps.
Avant de répondre à ces questions, intéressons-nous tout d’abord à ce qu’est vraiment l’automatisation robotisée des processus.
Qu’est-ce que l’automatisation robotisée des processus, ou Robotic Process Automation ?
Il s’agit de l’utilisation de robots (ou « bots logiciels ») pour la réalisation de tâches normalement effectuées par l’homme. Il s’agit d’automatiser des processus métiers existants et de libérer les opérationnels de ces tâches souvent jugées rébarbatives et sans valeur ajoutée pour qu’ils se concentrent sur des tâches plus valorisantes. Le recours aux robots pourra également être envisagé dans le cadre de processus complexes impliquant la manipulation de volumes importants de données.
Il existe différents types de RPA :
● La Robotic Desktop Automation (RPA attended)
Dans ce cas, le robot est paramétré pour effectuer la tâche à la place de l’opérationnel. L’automatisation de la tâche se fait sur le poste de travail même de l’opérationnel, dans le respect des processus métier existants (ouvrir une fenêtre, lire et collecter des données, exécuter une transaction…). Lorsqu’une tâche nécessite une prise de décision (comme faire un choix entre différentes solutions ou gérer une exception au processus métier), le robot rend la main à l’opérationnel. Une fois que l’humain a complété l’action que le robot n’a pas pu réaliser seul, il lui est possible de rendre la main au robot qui reprend alors l’automatisation.
Dans ce premier cas, il y a en quelque sorte une collaboration entre le robot et l’humain. Ce dernier n’intervient que lorsque la tâche à réaliser nécessite une intelligence, une expérience, les tâches à faible valeur ajoutée étant entièrement ou partiellement déléguées au robot.
Le mode attended est utile lorsque le processus ne peut pas être exécuté de bout en bout par un robot, pour les cas de figures où l’intervention de l’humain reste nécessaire. Par exemple, dans un centre d’appel, un conseiller clientèle tout en se concentrant sur l’appel d’un client, peut être aidé par un robot qui s’occupera de la récupération de données clients dans une application pour les saisir dans une seconde application. Le robot s’occupe de réaliser ces transactions simples alors que le conseiller peut privilégier la qualité de la relation client en se concentrant sur l’écoute de ce dernier et la résolution de son problème.
Ce niveau d’automatisation est rapide à mettre en œuvre car il a peu d’impact sur le SI. Le robot intervient sur la machine de l’opérationnel, en utilisant les interfaces et les processus existants.
● Robotic Process automation (RPA Unattended)
Dans ce second cas, il n’y a plus d’intervention de l’humain. De manière autonome, le robot effectue toutes les tâches pour lesquelles il a été programmé. Il s’agit généralement du lancement d’opérations par batch (exemple : saisie de données clients à partir de fichiers dans plusieurs applications). Le bon déroulement du processus et le traitement des alertes d’exécution sont eux-mêmes contrôlés par un autre robot à même de corriger les éventuelles erreurs et de relancer le processus.
Les modes attended et unattended ne sont pas exclusifs l’un de l’autre. Au contraire, une parfaite intégration de la RPA dans une organisation, quel que soit son domaine d’activité, prendra en compte ces deux modes d’automatisation. Le mode attended ayant pour vocation à optimiser les tâches pour lesquelles l’intervention de l’humain reste nécessaire, le second mode d’automatisation (unattended) étant intéressant pour tout ce qui concerne la performance et l’optimisation des coûts sur toute une gamme d’activités de Back Office.
Quels gains pour l’entreprise ?
Le recours à la RPA permet de diminuer le temps passé par l’homme à réaliser des tâches répétitives, limiter le risque d’erreurs et augmenter la satisfaction client.
La RPA visant à automatiser des processus, il est nécessaire que ceux-ci soient existants, cartographiés, stables et pérennes.
En effet, le recours à la RPA visant à gagner en efficacité tout en améliorant les processus existants, ce couple efficacité/amélioration ne sera atteint que si les processus à automatiser sont clairement identifiés et cartographiés. La RPA déploiera toute son efficacité dans les organisations qui auront fait ce travail d’analyse et de cartographie des processus existants en amont de la phase projet. A contrario, son efficacité sera très limitée dans les organisations où la documentation des processus est parcellaire et/ou devenue obsolète suite à la mise en place de nouvelles règles de gestion n’ayant pas été documentées. Dans ce second cas, il sera plus difficile d’identifier et de distinguer, de manière exhaustive, les tâches pouvant faire l’objet d’une automatisation et celles nécessitant l’intervention de l’homme. D’autre part, les processus n’ayant pas fait l’objet d’un mapping exhaustif sont souvent des processus complexes qui gagneraient à être simplifiés. L’automatisation de tels processus en l’état est très complexe pour un ROI souvent limité.
Les organisations qui envisagent la RPA gagneront à prendre le temps de mettre à plat l’ensemble de leur processus avant le lancement d’un tel projet. Cette mise à plat permettant alors d’identifier d’éventuelles failles et axes d’amélioration, voire une simplification. Ce qui aura été fait en amont ne sera plus à faire en aval. Sur le long terme, la réalisation des tâches par les robots permettra d’identifier d’autres axes d’améliorations et d’éventuels points de blocage à corriger.
La fidélisation des salariés
Loin de remplacer les salariés, la délégation de tâches répétitives et à faible valeur ajoutée leur permet de se concentrer sur des tâches plus valorisantes. Le salarié peut alors se concentrer sur l’amélioration de l’expérience client par exemple. Il participe également à l’optimisation des processus existants en identifiant les axes d’amélioration et les éventuels goulets d’étranglement. Libéré de tâches souvent chronophages, il pourra également se former sur de nouveaux sujets et monter en compétences sur d’autres fonctions. Selon une étude réalisée en février 2019 par Forester Consulting à la demande de UiPath (leader du secteur des logiciels d’automatisation des processus robotiques), 60 % des personnes interrogées pensent que la RPA aide les collaborateurs à se concentrer sur des tâches plus stratégiques.
L’automatisation, dès lors qu’elle est comprise par l’entreprise et les salariés, peut présenter un atout non négligeable pour la fidélisation tant des clients que des salariés. La réussite de l’intégration de la RPA doit tenir compte à la fois de la dimension humaine et psychologique du changement. La DSI, les Ressources Humaines et le Management doivent travailler de concert avec les opérationnels pour que l’expérience soit fructueuse.
Réduction du nombre d’erreurs et « best practices »
Comme vu plus haut, l’automatisation des processus nécessite la mise à plat des processus existants afin que les robots soient paramétrés pour réaliser les tâches qui leur sont déléguées de manière autonome. Les processus doivent être clairement identifiés et leur mise à plat permettra éventuellement leur optimisation. Le robot ne se trompant jamais dans la réalisation des tâches qui lui sont déléguées et la saisie des informations, le nombre d’erreurs est de ce fait réduit et aura des conséquences positives sur la traçabilité, le contrôle des processus et la conformité. Le recours à la RPA permettra à l’entreprise de réduire les risques d’erreurs et de garantir la mise en application des meilleures pratiques.
La satisfaction client
Par ricochet, l’absence d’erreurs permet d’augmenter la satisfaction client, dont les demandes sont traitées plus rapidement et avec plus d’efficacité. Pour les transactions ne nécessitant pas l’intervention de l’humain, les services deviennent accessibles 24h/24 et 7 jours/7. Le respect des délais est assuré et le client peut avoir une vision claire de l’avancement du traitement de ses demandes. La délégation permet également aux équipes d’être plus disponibles et donc de libérer du temps pour la relation client. Pour l’entreprise comme pour le client, la fidélisation et la satisfaction sont des atouts non négligeables.
Les exemples cités ne sont pas exhaustifs et la RPA peut présenter bien des atouts pour les organisations qui l’envisagent, quel que soit leur secteur d’activité. Pour autant, ces gains sont conditionnés à une préparation, une anticipation et un accompagnement, tant sur le plan purement organisationnel que sur le plan humain.