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L’AMLA : Une nouvelle autorité européenne pour renforcer la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme

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Maxime Minjoulat-Rey
Consultant

Contexte

Le Parlement européen a adopté, le 31 mai 2024, la création de l’Autorité européenne de lutte contre le blanchiment d’argent (AMLA pour Anti-Money Laundering Authority). Cette initiative s’inscrit dans un objectif d’unification et de renforcement des efforts de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT) au sein de l’Union européenne.

Organisation et déploiement de l’AMLA

L’AMLA sera basée à Francfort, aux côtés de la Banque Centrale Européenne. Sa structure organisationnelle comprendra un conseil d’administration, composé d’un président et de cinq membres, ainsi qu’un conseil exécutif divisé en deux branches : une branche « supervisory » regroupant les responsables des autorités publiques de supervision de la LCB-FT, et une branche « intelligence » comprenant les responsables des Financial Intelligence Units des États membres.

Le déploiement de l’AMLA se fera en plusieurs étapes. Dès 2025, le conseil d’administration sera constitué et les premières activités débuteront. La supervision directe, quant à elle, entrera en vigueur en 2028.

Les fonctions clés de l’AMLA

L’AMLA se voit confier un rôle central dans la supervision directe des entités financières présentant des profils de risque élevés, y compris les fournisseurs de services sur crypto-actifs. Elle sera habilitée à émettre des demandes d’informations et à mener des enquêtes approfondies, tant au niveau des groupes que des entités individuelles.

En parallèle, l’AMLA assurera la coordination entre les autorités nationales, qui lui transmettront leurs plans de contrôles. Elle pourra également formuler des recommandations à l’intention des autorités nationales et des cellules de renseignement financier des États membres.

L’AMLA aura également pour mission majeur la création d’une base de données centrale à l’échelle de l’UE, intégrant les informations déjà collectées par l’EBA (Eureca). Cette base de données facilitera les analyses de risques et renforcera la coopération entre les différents acteurs de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

Afin de mener à bien ses missions,  l’AMLA disposera d’un pouvoir de sanctions, lui permettant d’imposer des mesures de police administrative et des sanctions pécuniaires pouvant atteindre jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires annuel total d’une entité.

Impacts sur les établissements financiers

L’adoption de l’AMLA va entraîner des changements significatifs pour les établissements financiers. L’harmonisation des méthodes de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme au niveau européen permettra de renforcer la conformité avec une intensification des diligences des  établissements sur les activités et les transactions, ce qui impactera leurs pratiques opérationnelles.

La surveillance sera également renforcée, avec des pouvoirs alignés au niveau européen pour les autorités nationales. L’interconnexion des fichiers des comptes bancaires facilitera l’accès des cellules de renseignement financier aux informations nécessaires. Enfin, la mise en place de la plateforme centralisée FIU.Net doit permettre d’optimiser la coopération internationale en partageant des données opérationnelles entre les cellules de renseignement financier.

Impacts sur les systèmes d’information

Ces nouvelles exigences impliquent une modernisation des systèmes d’information des établissements financiers En effet, les outils dédiés à la connaissance client, au filtrage des clients et des paiements, à la surveillance des transactions et à la détection des negative news génèrent un volume important de données à collecter et à analyser. La rapidité de détection, d’analyse et d’escalade seront des atouts clé dans la lutte contre les circuits criminels.

La sécurité des données sera également un enjeu majeur. La collecte et le traitement des informations sensibles devront respecter des normes strictes, et l’échange transfrontalier des données devra s’effectuer de manière sécurisée pour garantir leur intégrité et confidentialité.

Enfin, l’interopérabilité entre les pays et les parties prenantes sera essentielle pour faciliter l’intégration de l’Intelligence Artificielle et des traitements automatisés des données, conformément aux Regulatory Technical Standards qui définiront la typologie des données à transmettre à l’AMLA.

En conclusion, l’Autorité européenne de lutte contre le blanchiment d’argent (AMLA) représente une avancée significative dans la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme au sein de l’Union européenne. En centralisant et en harmonisant les efforts de supervision et de renseignement, l’AMLA permettra de renforcer la conformité et la sécurité des établissements financiers.

Par ailleurs, en créant un environnement financier plus sécurisé et transparent, cette nouvelle règlementation pourrait favoriser la confiance des clients et des investisseurs, tout en renforçant la réputation des établissements financiers au niveau mondial.

Pour les établissements financiers, il est crucial de se préparer aux nouvelles exigences imposées par l’AMLA. En adoptant des mesures proactives et en modernisant leurs systèmes d’information, ils pourront non seulement se conformer aux nouvelles réglementations, mais aussi améliorer leur efficacité opérationnelle et leur résilience face aux menaces financières.