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Loi industrie verte : les nouvelles exigences pour les assureurs

Taméra Monteiro
Consultante

Qu’est-ce que la loi industrie verte ?

Votée en octobre 2023, la loi industrie verte a pour finalité la convergence des leviers économiques et environnementaux pour renforcer la souveraineté industrielle de la France, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre.

À cet effet, la réglementation prévoit entre autres :

– l’accompagnement de la transition écologique du secteur industriel français ;

– le développement de nouveaux secteurs de l’économie verte, dont la création d’emplois dans quatre filières de la transition écologique.

Pour financer ces nouvelles orientations, le gouvernement s’appuie sur des financements publics mais aussi privés. L’épargne des ménages est en partie sollicitée, ce qui implique l’adhésion et la participation des acteurs du secteur assurantiel.

 

 Quels sont les impacts de la loi industrie verte pour les assureurs ?

La loi industrie verte, par le biais de plusieurs mesures, confère aux assureurs un rôle majeur pour encourager et démocratiser les investissements responsables auprès de leur clientèle.

Une gestion pilotée plus durable et sécuritaire

Depuis le 24 octobre 2024, s’agissant des contrats d’assurance vie et d’épargne retraite (PER), les assureurs ont l’obligation de proposer une gestion pilotée incluant une part minimale de fonds non cotés ; dont l’allocation dépend du profil investisseur et de la durée restante avant la retraite pour le PER uniquement. Ces véhicules d’investissement placent les capitaux dans des entreprises privées ou des actifs qui ne sont pas négociés sur les marchés financiers publics. Investir dans des actions ou obligations responsables permet de générer des rendements tout en soutenant la transition vers une économie plus verte et respectueuse de l’environnement.

Un référencement obligatoire des fonds labellisés par l’Etat

La loi industrie verte favorise et généralise les placements durables par le référencement obligatoire des fonds reconnus par l’Etat. Depuis le 1er janvier 2024, chaque contrat d’assurance vie doit proposer au moins une unité de compte constituée d’actifs ayant obtenu les labels « ISR » (investissement socialement responsable) ou « Greenfin ».

Quant au PER (plan épargne retraite), depuis le 1er juillet 2024, ce contrat doit proposer au moins un fonds labellisé par au moins l’un des labels suivants : « ISR », « Greenfin », « Relance », « Finansol », et « Comité intersyndical de l’épargne salariale ».

La proposition d’unités de compte non cotées dans les contrats d’assurance vie et PER est imposée par la loi. Pour inciter les clients à investir sur les UC vertes, une part minimum est rendue obligatoire par la loi dans la gestion profilée. À défaut, la législation prévoit des sanctions financières envers les investisseurs institutionnels, telles des pénalités de non-conformité et des amendes.

Un renforcement du devoir de transparence et de conseil

Désormais, pour les produits d’assurance vie, de capitalisation, et de retraite, les investisseurs institutionnels ont l’obligation de proposer des produits adaptés aux besoins et aux objectifs des clients. En matière d’accompagnement des assurés, le respect les critères sociaux, environnementaux, et de gouvernance (ESG) demeure obligatoire. En considérant les préférences des adhérents, les assureurs doivent désormais systématiquement proposer des unités de comptes labellisées vertes émanant des entreprises de taille intermédiaire (ETI).

La loi Industrie Verte poursuit l’objectif d’orienter l’épargne des Français vers des investissements durables. Pour ce faire, les assureurs doivent non seulement intégrer des solutions d’épargne verte à leur portefeuille, mais aussi contribuer à la promotion de l’économie durable en proposant à leurs clients des produits d’assurance responsables et attractifs. Réciproquement, cela suppose la réduction de l’exposition des clients aux investissements moins vertueux. L’adaptation de l’offre et du service est ainsi capitale.

Un compte rendu obligatoire des activités de gestion

Le mandat d’arbitrage, permettant à l’assuré de déléguer la gestion de ses placements à une société de gestion ou un gestionnaire de portefeuille (délégataire) fait l’objet d’un encadrement réglementaire depuis le décret n°2024-572 du 21 juin 2024.

Pour chaque mandat d’arbitrage signé à compter du 24/10/2024, il est désormais obligatoire de communiquer au client un Compte-Rendu de Gestion (CRG), au moins une fois par an et à la résiliation du mandat.

Il incombe au mandataire, outre de respecter la réglementation en termes d’investissement, de concevoir le CRG selon les directives imposées. Le CRG doit notamment faire mention des frais de gestion supportés au titre du mandat ; en conséquence, les frais de gestion administrative doivent être isolés des frais de gestion financière pour la gestion profilée.

 

 Comment mettre en œuvre les exigences réglementaires de la loi l’industrie verte ?

Les mesures à caractère impératif de la loi industrie verte, supposent la revue exhaustive et approfondie des composantes clés de son activité d’assureur.

Optimiser la mise en place des placements durables dans ses activités

La loi industrie verte transforme les normes et pratiques habituelles du métier. Pour faciliter la transition vers une gestion des activités responsable, il est nécessaire de prévoir des actions de conduite du changement auprès des équipes internes (gestionnaires, commerciaux, …).

En termes d’accompagnement, cela peut se traduire par :

– des dispositifs de formation sur les enjeux et les impacts de la loi industrie verte ;

– des ateliers de sensibilisation à l’économie durable ;

– une communication interne et externe sur les exigences de la nouvelle réglementation.

Par ailleurs, l’intégration de placements vertueux à son portefeuille suppose de mettre à jour tout l’écosystème actif/passif. Cette remise à niveau implique entre autres :

– l’intégration des fonds non cotés dans la gestion du carnet d’ordre à l’actif et au passif : il est essentiel de définir les conditions de valorisation des unités de compte durables ;

– la gestion des risques : les ETI, par leur structure organisationnelle, peuvent présenter une performance économique et financière particulièrement instable ; en conséquence, les aléas liés au placement de son capital sur des actions et obligations émanant de ces entreprises doivent être maîtrisés ;

– la révision de la politique d’investissement induite par l’obligation pour les investisseurs de détenir un pourcentage minimal de fonds non cotés : conformément au profil de gestion du client, il est de rigueur de définir une stratégie de placement efficiente.

Tous ces éléments doivent évidemment être repris et diffusés dans l’ensemble des outils du SI. Il est essentiel de faire converger les différents applicatifs, pour assurer la cohérence, la continuité et la fluidité des opérations.

Les éditeurs de logiciels sont tenus d’appliquer la nouvelle réglementation. Cependant, subsiste une part non négligeable de travail à mettre en place (paramétrage du réseau des mandataires, mise à niveau des courriers de gestion, …).

En conclusion, mettre en œuvre les exigences réglementaires de la loi industrie verte est un véritable projet impliquant une adaptation proactive des règles et usages internes. Concilier optimisation financière et conformité réglementaire suppose une gestion rigoureuse des risques, l’adoption de solutions durables innovantes, et l’optimisation des coûts ; ce qui implique, la mobilisation de l’ensemble des fonctions stratégiques de l’entreprise, de l’étude du besoin jusqu’au déploiement, en passant par la conception détaillée de la solution.

Et vous ? Où en êtes-vous dans votre transition vers l’assurance verte ?